« Les voleurs de basse-cour le savent et le disent : Quand
on réussit un coup mirifique avec un second, on ne jouit
pleinement du fruit de la rapine qu’après avoir éliminé
ce second. ». Ahmadou Kourouma.
Extrait de « Allah n’est pas obligé ».
Fasciné par les lambris des palais et les sirènes du pouvoir, il a défendu Karim Wade soutenant que « ce n’est pas parce qu’on est fils d’un président qu’on ne peut pas travailler dans son entourage, c’est un faux problème » ; que « tout, dans la démarche du président Abdoulaye Wade, nous ancre profondément dans la République » ; que le Président Wade est « pour le Sénégal et l’Afrique, ce que Napoléon fut pour la France » ; que « Comme Roosvelt qui, en 1929, tira l’Amérique de la grande récession par la politique des grands travaux, le Président Wade a mis le Sénégal sur orbite, pour en faire un pays émergent ».
Tyrannique. Il a trahi Landing Savané ; injurié le doyen Mamadou Dia ; organisé le défilé ininterrompu de journalistes à la division des investigations criminelles ; ordonné la répression à la matraque électrique des marches de protestation ; dirigé l’arrestation musclée de Jean Paul Diaz et de son Fils ; envoyé Idrissa Seck en prison ; mis aux arrêts Ousmane Tanor Dieng, Moustapha Niass et Abdoulaye Bathily ; enjoint ses services de châtier Amath Dansokho ; menacé de bastonner le président d’un bureau de vote et réussi tout de même de force, contre toute valeur républicaine qu’il porte actuellement en bandoulière, à jeter son bulletin dans l’urne alors qu’il ne s’était pas muni de sa carte d’électeur. Nous sommes tous en danger.
Malacky. Bien sûr, nous l’avons mal acquis ! Nous ne voulions que nous débarrasser de son Maître qu’on croyait rapetisser notre condition sociale. Et le voilà, contre toute expresse attente sociale, qui ne s’occupe que de supposés biens mal acquis qu’il classe dans la catégorie des demandes sociales, comme si mettre ces gens en prison nous rassasie de toutes nos faims. Bien au contraire, l’incapacité de l’équipe gouvernementale à juguler la crise socioéconomique qui a porté le Roi Nègre au pouvoir édulcore désormais l’optimisme d’un Sénégal prometteur.
MaLAcky est mal parti. En une année, il a démenti, presque point par point toutes nos espérances. Toutes les structures, les actions et les personnes qui fondaient légitimement nos espoirs se sont délitées avec une rapidité déconcertante. Les mouvements citoyens et les partis politiques qui en étaient l’instrument se sont dilués dans le factionnalisme. Aux antipodes des espoirs placés sur le nouvel élan d’une renaissance nationale, Moi, le Sénégalais relève désormais les dangers qui le guettent. Il envisage dorénavant la possibilité que le Roi Nègre ne soit pas capable de développer une idéologie révolutionnaire et ne puisse pas mettre en place une organisation politique susceptible de porter la rupture tant attendue.
FAMINE. Pendant que le Roi Nègre, comme qui dirait le « général Koyaga » (Kourouma), demeure obnubilé à émasculer ses adversaires, les denrées de première nécessité se raréfient intensément, s’ils ne deviennent pas de plus en plus inaccessibles : accroissement du coût puis pénurie de gaz butane ; absence sur le marché de l’huile d’arachide dont on annonce le doublement du coût à l’achat ; augmentation du prix du riz ; raréfaction du poisson si indispensable au mets national, pour cause, le gouvernement a spolié nos ressources halieutiques en distribuant des licences de pêche à tout va et, la période de soudure, les inondations et les coupures intempestives d’électricité pointent à nouveau à l’horizon…
Faillite GENERALE ! Tout se passe alors comme si, des travers de ses prédécesseurs, le Roi Nègre n’a tiré aucune leçon prospective. En dehors d’une explication policière du passé, il ne semble avoir tiré aucune conséquence des échecs successifs, résultats de politiques inadaptées. Aucune action du gouvernement n’a encore permis d’établir qu’il tient à honorer ses engagements. Bien au contraire. Il déguerpit nos ateliers de fortune sans se soucier de l’impact de l’inactivité de la population active sur l’économie nationale. Il nous tient à la gorge comme si ce régime d’ascèse n’influait pas sur notre quotidien. Il jette les uns et les autres en prison pour donner l’impression d’avoir de la poigne, de respecter ses engagements. Or, nous le savons et nous en sommes de plus en plus convaincus, il ne s’agit là que d’une fioriture qui cache mal une déficience publique chronique.
DECEPTION. Là où nous nous attendions à une distinction d’avec les méthodes anciennes et rétrogrades de gouvernance, nous assistons à une rupture dans la continuité ; là où l’on s’attendait à l’augmentation de notre pouvoir d’achat par une baisse remarquable du coût exorbitant de la vie, il n’a fait que réviser le code général des impôts comme si nous étions tous des fonctionnaires ; là où nous nous attendions à des mesures tendant à résorber la demande sociale et à réduire drastiquement la pauvreté qui agit en nous comme une escarre, il nous a servi une traque qui n’a de finalités que politiques. A vrai dire, nous sommes déçus, outrés et maintenant plus impécunieux que jamais. Ce n’est pas inédit. Les « rois nègres », despotes installés au pouvoir par une puissance coloniale soucieuse de conserver le pied qu’elle avait presque fini de perdre dans son ancien empire, ne prospèrent que dans la faillite générale. C’est l’histoire d’un de ces pantins que Ahmadou Kourouma nous narre dans « En attendant le vote des bêtes sauvages ».
REVOLTE. Nos dirigeants, avec une énergie surprenante et destructrice, ont, en si peu de temps, reproduit jusqu’à la caricature les séries de clichés racistes et meurtriers dont les colonisateurs affublaient l’Afrique : nègre barbare, jouisseur, roitelet, nègre tyrannique, irrationnel, incompétent et donc, incapable de prendre son destin en main… Moi, le Sénégalais ne se nourrit pas de traque aux biens mal acquis. Enlèves-lui donc le pain de la bouche et il mourra pour son droit de vivre. Et c’est, en l’occurrence, ce qu’il va faire car le Roi-Nègre qui a presque fini de lui soustraire sa dignité, n’a de cesse de l’asséner de crimes.
COURAGE mes Frères et Sœurs, nous ne sommes pas au bout de nos peines. Le combat sera rude. Il se gagnera casemate par casemate, tranchée par tranchée. Des soldats tombent, d’autres prennent la ligne pour que vivent les Sénégalais unis et prospères.
Pierre Hamet BA