Catégories
Mon Journal

Cronos et Pape Diop

Les Sénégalais, peuple le plus bavard de la terre aux dires d’un diplomate Français, aiment gloser sur leur Président du Sénat. Sur lui, on a tout dit ou presque rien. On le dit tantôt né à Mbour. Tantôt à Mboss ou  à Kaolack en 1954, d’un père marabout décédé très tôt alors que le jeune Moustapha, de son vrai nom dit-on, avait à peine 4 ans. Elevé par une tante à Thiès, il est confronté très tôt aux dures réalités de la vie. Pauvre jeune homme, sans grand bagage intellectuel, il parvient tout de même à obtenir son diplôme de comptable à l’Institut Universitaire de Technologie (IUT) en 1976. Faux, rétorqueront certains contempteurs qui parlent d’une biographie arrangée. Son cursus scolaire se serait arrêté au brevet élémentaire. Il aurait exercé de petits métiers, fait du commerce de détail, aurait travaillé à l’ONCAD, géré une station service. Un ensemble de suppositions qui ne permettent pas d’établir avec certitude le parcours du bonhomme. Toutefois, les sources concordent en ce qu’il ait tout de même créé la SOUMEX (Soumbédioune Export), société spécialisée dans l’exportation de produits halieutiques vers l’Europe. En somme, Pape Diop est un goorgoorlou parvenu. Dans la petite histoire politique du Sénégal, le fait est assez singulier pour ne pas mériter attention. Comment, un homme du peuple, que rien apparemment ne destinait à la politique, s’est-il retrouvé dans le cercle si restreint des décideurs de notre pays ?

 

En 1993, Pape Diop obtient son premier mandat de député à l’Assemblée Nationale. Quand survient l’Alternance en 2000, il devient maire de Dakar. Peu après, il se voit propulsé au perchoir de l’Assemblée Nationale. Mais à l’époque, la problématique de la succession ne se posait pas encore. Il était naturellement admis que le Président Abdoulaye Wade allait être remplacé par Idrissa Seck. Mais ce dernier se rendit vite compte que son mentor n’avait pas l’intention de céder le fauteuil présidentiel après un mandat de 7 ans.

 

Commence alors un épisode de stratagèmes politiques qui atteint son paroxysme à la sortie de «Wade, un opposant au pouvoir ou l’alternance piégée ?». Pape Diop, alors président de l’Assemblée Nationale, s’exprimant sur la diatribe de Coulibaly, déclare n’avoir pas lu le livre du journaliste mais que ce dernier avait pour but tout ensemble de mettre en mal le Président de la République et son Premier Ministre d’alors : Idrissa Seck. Ce dernier, ne tardera d’ailleurs pas à être accusé d’avoir commandité l’ouvrage signé par Abdou Latif Coulibaly.

 

Revenant de vacances, le Président de la République déclare qu’«Il y a une main derrière Latif» et que bien des gens qui lui sont dévoués allaient prendre sa défense. Bientôt, la riposte s’organise. Ndiogou Wack Seck est appelé à la rescousse. Il crée «Le Messager», quotidien d’informations générales, puis le quotidien «Il est midi». N’ayant de cesse de critiquer le désormais ex premier ministre, Ndiogou Wack publie le scandale des chantiers de Thiès. Le Parti Démocratique Sénégalais (PDS) implose. Idrissa Seck est remercié de la primature, écarté de la direction du parti, puis emprisonné. Abdoulaye Wade est désormais seul. Plus d’homme de main. Plus de successeur connu. Plus de dauphin, si tant est qu’il en eût eu. Et la question de la succession fait alors surface.

 

Comme s’il souffrait de quelque chose, le Président Wade se met à nommer et à remercier à tout va. Les anciens ennemis deviennent de nouveaux amis. Et les amis, de nouveaux ennemis. Vraisemblablement, Wade a perdu toute capacité à faire confiance à ses proches collaborateurs. Et le voilà qui ne va pas tarder à s’agripper à ce qu’il pourrait mieux maitriser : son fils.

 

Dans la perspective des élections de 2007, Wade exécute ses plans. Après Moustapha Niasse, Mame Madior Boye, personnage apparemment neutre, se charge de la primature en attendant que le Pape du Sopi éteigne le feu qui lui brûle la barbe : les alliés de l’alternance sont maintenant devenus des opposants. Mais survint le drame du Diola. Et Wade, fortement influencé par Idrissa Seck qui convoitait la primature, en profite pour faire payer les pots cassés à Madame Boye. C’est maintenant la dernière ligne droite vers 2007 et il faut neutraliser Idrissa Seck qui menace de décimer le PDS aux prochaines élections. Macky Sall est parachuté à la primature et la contre attaque s’organise à Thiès avec Abdou Fall comme fer de lance. Mais jusque là, une question demeure sans réponse : quel successeur ?

 

L’âge avancé du Président de la République ne facilite pas les choses. Tantôt les opposants en font un argument contre sa réélection. Tantôt, ce sont ses propres militants qui agitent la question, prétextant que la bibliothèque Wade n’a pas fini de nous livrer ses secrets. De manière inavouée cependant, l’entourage de l’avocat Président n’est pas loin de penser comme l’opposition. La question reste donc taboue. Mais dans l’entourage du président, on se prépare, on se mesure à soi-même, on se mire et on se dit que ce n’est pas impossible, on rêve, le pouvoir semble être accessible à tous. Chacun veut succéder au père épuisé et affaibli par le départ de son directeur de campagne de l’année de gloire. Le jeu consiste maintenant à se hisser à une place assez stratégique pour être parmi les favoris, un certain jour J. Quelque chose comme un syndrome du possible commence à ravager le PDS. En effet, ils pensent tous que le pouvoir est désormais dans la rue et qu’il suffit seulement de prendre la peine de se baisser pour le ramasser. Seulement, Wade est bien vivant.

 

Profondément atteint par les attitudes de ses proches, plus enclins à profiter de ses largesses qu’à prendre des coups à sa place, le Président Wade s’en indigne et tombe dans un état d’angoisse post-traumatique. Il ne fait plus aucun doute, Wade a perdu confiance en ses compagnons. Comme dans la plupart des cas d’angoisse post-traumatique, il tombe dans ce qu’on appelle le «phénomène de régression» et développe alors une profonde nostalgie d’un univers de type maternel. C’est-à-dire clos et protecteur. Et, cette quête ne peut trouver d’autres objets adéquats que le groupe familial. A défaut donc de pouvoir se blottir physiquement contre le corps maternel, il se blottit psychologiquement dans la grande matrice sociale qu’est le lignage. D’où la solution qu’il pense avoir trouvé en la personne de Karim Meïssa Wade, son fils. Mais comment approcher de la scène politique une personne qui s’en est toujours tenue trop éloignée ? Telle est la problématique qui semble désormais hanter le sommeil du Président de Me Abdoulaye Wade.

 

———

 

Le Sénégal occupe la présidence de l’OCI et doit abriter la rencontre des chefs d’Etats de la même organisation. Une agence est créée pour organiser la conférence et Karim Meïssa Wade en devient le Président. Comme pour le mettre à l’abri d’éventuels scandales financiers, on lui colle un secrétaire exécutif qui, de fait, cumule sa nouvelle fonction avec celle de Secrétaire Général de la Présidence. L’OCI devient vite un prétexte pour tout. Un véritable fourre-tout qui allie les allures d’un centre d’œuvres de charité et d’un ministère du développement social : distribution de denrées alimentaires, organisation d’aide aux mosquées, associations et organisations de masse bénéficiant des largesses de son Président. Rapidement, le clientélisme se développe autour de Karim Meïssa Wade. Des organisations de soutien naissent partout sur le territoire national. Le président de l’ANOCI est désormais sur la sellette. Des personnalités politiques commencent à se constituer en troubadour du nouveau sultan du sahel. Et certains d’entre eux comme Adama Bâ, maintenant ex maire de Gueule-tapée-Fass-Colobane et Amadou Tidiane Wone, piètre ministre de la Culture emporté par la vague déferlante qui chavira le Diola, ne tardent pas à invoquer ce qui pourrait être symptomatique du syndrome du possible : «Pourquoi pas Karim ?».

 

Un véritable pêle-mêle de stratégies de popularisation d’un illustre inconnu politique fait alors jour. Comme s’il voulait prouver quelque chose aux Sénégalais, Karim Meïssa Wade duplique les actions sur l’ensemble du territoire national. Mais la presse sénégalaise décèle en ses actes, une véritable démarche politique qui nourrit alors les supputations les plus folles sur son éventuelle préparation à la succession du Président Wade. Le débat successoral revient ainsi à la Une. Comme si leurs propres parents avaient mené leur existence dans le virtuel, les acolytes du Président de l’ANOCI créent, en catimini d’abord puis en grande pompe, la Génération du Concret. Une organisation dont le but reste encore aujourd’hui inavoué, quand bien même les observateurs y voient un parti politique en dormance. Et visiblement, Karim M. Wade n’est pas sans s’en plaire. Il ne confirme ni n’infirme les ambitions qu’on lui prête.

 

Dans cet imbroglio politique, Pape Diop est le parfait pion. Petit de taille, le visage rond et poupin, peu disert et mauvais orateur, personnage effacé et presque falot, il déclare n’avoir d’autres ambitions que de servir le Président Wade. Il a bien le profil d’un successeur constitutionnel sans d’autres objectifs sinon d’organiser les élections s’il arrivait malheur au Président de la République (que Dieu l’en garde).

 

Mais l’angoisse post-traumatique ne s’est pas encore dissipée. Abdoulaye Wade, à l’instar du Dieu Cronos, se met à dévorer ses propres enfants. Dès que la presse, les associations de soutien où même les griots vantent les mérites d’un des leaders de son parti, il prend peur. Le syndrome Idrissa Seck réapparaît à ses yeux, son traumatisme refait surface, l’angoisse l’envahi et il dévore.

 

Dans la trilogie syndrome-traumatisme-angoisse, Wade fortifie ses défenses. Il manigance maintenant pour écarter Macky Sall qui venait de contribuer fortement à la victoire du PDS et de ses alliés lors des élections présidentielle et législatives de 2007. Mais entre un ingénieur visiblement teigneux et un poissonnier apparemment docile, Abdoulaye Wade n’a d’autre choix que de conserver Pape Diop comme deuxième personnalité de l’Etat. Il va donc amorcer la disgrâce de Macky Sall pour enclencher la chute de Pape Diop. Il envoie le premier à l’assemblée nationale, à la place du deuxième qui va chômer le temps qu’un Sénat taillé sur mesure soit placée sous son autorité. Quand on sait que l’Assemblée Nationale, sous Senghor, sous Diouf et maintenant sous Wade, est une chambre d’enregistrement et la caisse de résonnance du parti au pouvoir, on se rend vite compte que c’est là, un désaveu de l’ancien Premier Ministre Macky Sall.

 

Jusque là,  Pape Diop reste la deuxième personnalité de l’Etat dans l’ordre protocolaire et dauphin constitutionnel. Dans un régime hyper présidentialisé où abondent maints nigauds, opportunistes et aventuriers, il occupe une place à part, cultivant son jardin secret, ne faisant jamais de déclarations fracassantes, et faisant peu de vagues malgré toutes les couleuvres qu’il a dû avaler. Tout semblait alors lui réussir. Mais c’est sans compter avec les rumeurs qui commencent à lui prêter des intentions de vouloir, soit conserver le pouvoir, soit de tout mettre en œuvre pour le triomphe d’Idrissa Seck, s’il arrivait à assurer l’intérim pour quelque raison que ce soit. On lui prête pour ainsi dire de fortes accointances avec Idrissa Seck. Dans les coulisses du PDS, on commence à se rendre compte que le poissonnier n’est pas si rond qu’il le laisse paraître. Bien au contraire, tout semble confirmer qu’il cultive la discrétion dans un pays ou la logorrhée verbale, le fantasque, le merveilleux et l’emphase sont une seconde nature chez les hommes politiques. Bien qu’on le décrive comme un personnage courtois mais assez terne, peu porté sur les discussions intellectuelles et les analyses politiques raffinées, on retrouve son nom dans tous les conciliabules et conclaves jalonnant la vie de la République. Y a-t-il donc du docteur Jekkyl en ce personnage terne qui apparaît le jour comme un bon notable politique presque rad de soc, et se transforme la nuit en un Monsieur Hyde ? Une telle interrogation n’est-elle pas à l’origine des appétits de Cronos à son égard ?

 

Ce que l’on peut dire, c’est que les événements du 22 mars 2009 constituent une bonne salade pour aiguiser l’appétit de Cronos. Le fait est en effet inédit. Pour la première fois dans l’histoire du Sénégal, le pouvoir perd la mairie de la capitale. Une véritable gifle pour le régime qui se targuait d’avoir ouvert de grands chantiers pour l’embellissement de Dakar. D’autant que celui qui incarnait ce nouveau sursaut de la ville n’est autre que Karim Meïssa Wade, colistier du maire sortant. Quelle est donc la responsabilité de Pape Diop dans cette terminaison dépréciative du régime ? Est-il à l’origine de ce coup de massue électoral ? Lui qui, dit-on, avait juré à Wade de conserver la mairie de Dakar. A-t-il commis une bourde lorsqu’il déclare vouloir céder la mairie une fois conquise à Karim Wade ? Ce qui a bien pu déclencher l’ire des électeurs sénégalais très portés à s’opposer contre ce qu’il considère comme une dérive monarchique du pouvoir. En définitive, Pape Diop a-t-il tout bonnement fait le lit de la défaite de Karim Wade ?

 

En tout cas, Pape Diop ne semble pas avoir sauté au plafond à l’évocation des ambitions de Karim Wade pour la mairie de Dakar. D’abord, le prestige que confère le poste de maire de la capitale est l’atout stratégique idéal pour tout politicien qui rêve d’un destin national. Ensuite, Karim l’a totalement écarté de la réalisation des chantiers de Dakar. Nulle part Pape Diop n’est apparu dans la réalisation des travaux de l’ANOCI. Bien que la mairie ait été sollicitée financièrement pour le volet éclairage public, on ne parle point de lui. Pire, aucune réalisation n’est pas comptabilisé dans son bilan. On aurait pu comprendre qu’on s’attache les services de ses compétences dans la réalisation des travaux de sa ville. Mais ce ne fut pas le cas. Pape Diop a été snobé. Et, en plus d’avoir été enlevé de la présidence de l’Assemblée Nationale qui, d’un point de vue institutionnel, confère plus de garantie, il a été difficilement logé dans un sénat à l’avenir hypothétique. Naturellement, une telle attitude à son égard a bien pu générer un pincement au cœur, quelque chose comme une jalousie, une rancœur. Karim à la mairie signifie la perte du contrôle de sa base politique qu’il a tant peiné à mettre en place. La fin d’un juteux budget qui crée un clientélisme important. Et surtout, la fin certaine de sa carrière politique. La mauvaise stratégie que Pape Diop a adoptée durant les locales est-elle alors à mettre sous le coup d’une désinvolture béate ?

 

Visiblement, Pape Diop ne s’est pas donné corps et âme pour gagner la ville de Dakar. Il y aurait même à se demander s’il n’a pas plutôt œuvré pour la défaite du PDS. Affirmant à tort et à travers qu’il ne fait pas de campagne parce qu’il ne rencontre aucune opposition sur le terrain, Pape Diop a été certainement le seul à ne pas se rendre compte du travail de sape qui a été réalisé par l’opposition. D’ailleurs, lors de son meeting le plus significatif avec Béthio Thioune, il a soutenu que l’opposition était inexistante à Dakar, d’où son choix de ne pas battre campagne. Mais, pourquoi Pape Diop s’est-il allié à Béthio Thioune qui, en ces temps, était en conflit latent avec le Président de la République dont il prétextait avoir été le principal instigateur de sa réélection ? Que penser de la déclaration de Béthio indiquant qu’il allait faire réélire Pape Diop à la mairie de Dakar ? Etait-ce une déclaration de circonstance, sans contenu caché pour que les apparences soient sauves ? Ou était-ce plutôt un message à ses fidèles pour ne pas que Karim soit porté au poste de maire de Dakar ?

 

———

 

Un corps abandonné à lui-même tombe en suivant une direction qui est la verticale. Cette notion de physique qui explique les lois de la pesanteur s’applique bien à la démarche de Wade. Ce dernier a, avec ses meilleurs soins, fabriqué tous les leadeurs de son parti. Il le dit lui-même : «Dieu a créé les hommes, j’ai créé Idrissa Seck». Abandonné donc à eux-mêmes, ils n’ont aucune légitimité. Ils suivent la verticale et finissent par s’écraser. Aucune lecture ne donne de manière cohérente une quelconque démarche politique de leur part. Toutes leurs actions se confinent dans une éternelle lutte contre la verticale. Ils manœuvrent, manigancent, s’agenouillent et se prosternent pour ne pas être abandonnés à eux-mêmes. Ceci en a été de Modou Diagne Fada, Macky Sall, Ousmane Ngom, Aliou Sow…, la liste est longue sans être exhaustive. D’où Pape Diop tire-t-il alors sa place de dauphin constitutionnel ? Est-ce par la longévité de son compagnonnage avec Me Abdoulaye Wade ? Ou y-a-t-il d’autres raisons sous-jacentes ?

 

De toute manière, on ne peut pas soutenir que Pape Diop ait bénéficié de sa position par la durée de son engagement dans le parti. Les entrées dans l’entourage de Wade ainsi que les sorties si fracassantes défrayaient tellement la chronique qu’il est difficile d’admettre, même si certains le prétendent, que Pape Diop ait adhéré au PDS dès sa création. En 1974, le bataillon des premiers fidèles était si réduit qu’il n’aurait pas pu passer inaperçu. En tout cas, quelqu’un se serait tout de même souvenu de lui. Mais le fait est qu’il n’apparaît nulle-part. Ni dans les grandes manifestations politiques, ni dans les actes mémorables posés par le PDS d’alors dont de grands noms tels que Baïla Wone, feu Badara Diop, Amadou Booker Washington Sadji, feu Puritian Fall, Moussa Diallo, Alassane Cissokho, Serigne Diop, Ousmane Ngom, Marcel Bassène, Laye Diop Diatta, Papa Demba Diallo, Assane Cissé, Dame Kébé, feu Fara Ndiaye, feu Boubacar Sall, résistent encore à l’oubli.

 

Le PDS de jadis fut un refuge pour nombre d’hommes et de femmes qui défiaient la puissance et l’autoritarisme de l’UPS, parti-Etat de fait. Ils y avaient trouvé exutoire et sang neuf. Certains n’y sont pas restés, d’autres ont gardé la boutique. Mais de ce ballet incessant on ne se souvient pas du tout de Pape Diop. A moins que Wade ait usé du même stratagème que François Mitterrand qui aimait cloisonner ses cercles d’amis de sorte que bien des gens qui n’étaient pas destinés à se rencontrer découvrent, au soir du 10 mai 1981, qu’ils servaient le même maître depuis des années. Pape Diop était-il alors un financier occulte qui renflouait les caisses du parti au moment ou celui-ci et son leader charismatique traversaient des années de vaches maigres ?

 

Quoi qu’il en soit et de tout ce qui précède, il apparaît nettement que Pape Diop, ex Maire de Dakar, ex Président de l’Assemblée Nationale et actuellement Président du Sénat, n’a été que le fruit de multiples concours de circonstances. Il a joué la partition que lui avait conférée le chef d’orchestre qui, présentement, semble composer une nouvelle symphonie. On parle de plus en plus de la disparition du Sénat. Pis, le 4 Avril 2009, le Président annonce son projet de nommer un Vice Président. Le décret est signé le 24 août 2009. Certains observateurs y voient des indices de la fin politique d’un homme qui continue pourtant de jurer fidélité et dévouement au Président Wade. Pape Diop est alors en passe de prendre la verticale. Et de lui, il risque de ne rester que le souvenir d’un fils ayant lui-même aiguisé les appétits de Cronos. Car assurément, Wade tend de plus en plus à s’éloigner de son intérimaire. Il ne le cite ni ne fait référence à lui depuis la débâcle du 22 mars 2009.  Seulement, le poste de Vice-président est dépourvu de pouvoir constitutionnel. Pape Diop demeure pour ainsi dire l’intérimaire que Wade s’est choisi. Ce qui pose avec une certaine acuité, pas seulement le devenir de l’actuel Président du Sénat si cette institution venait à être supprimée, mais aussi et surtout la question de sa légitimité. Car, comment oser penser qu’une personne n’ayant pas pu conserver sa place de maire de la capitale, donc sans base politique conséquente, puisse organiser des élections que son parti ne voudrait pas perdre sous quelque prétexte que ce soit. En perdant donc la mairie de Dakar, Pape Diop s’est jeté à Cronos. Seul, abandonné à lui-même, il prend la verticale et amorce une chute libre.

 

PIERRE HAMET BA

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *