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ET SI GUTERRES AVAIT RAISON

Bien qu’ayant été indigné par l’assertion de Guterres selon laquelle une catastrophe sanitaire allait s’abattre sur l’Afrique occasionnant par la même des millions de morts; et bien que, dans un précédant article (Guterres, vous avez tort), je démontrais qu’une telle catacombe ne saurait arriver en Afrique, j’envisage désormais la possibilité que l’Afrique ne soit pas capable de contenir la pandémie.

Mes démonstrations précédentes, principalement basées sur une étude comparative des démographies occidentales et africaines et sur la résilience des peuples africains face aux multiples pandémies qui ont traversé son histoire, ont manqué de prendre en compte les limites politiques de l’État africain, et donc son incapacité à convaincre sa population du bien-fondé de ses décisions, à trouver des alternatives locales, d’inventer, à défaut de se réinventer, des solutions nouvelles, des approches prospectives stratégiques inédites.

Tout se passe comme si les dirigeants africains se sont contentés de copier les anciennes métropoles colonisatrices et de plaquer, avec le même agenda, leurs solutions sur une population qui n’a ni le même niveau d’éducation, toute proportion gardée, ni la même historicité, encore moins la même appréhension de la mort.

Par ailleurs, si l’on se penche de plus près sur les circonstances qui ont précipité la fin des mesures préventives et la reprise progressive, sinon totale, de pratiquement toutes les activités sociales en Afrique malgré le risque encore élevé de contamination à grande échelle, on se rend vite compte que la peur de violentes protestations, d’émeutes et peut-être même de renversement de régime s’est saisie de nos dirigeants.

Parce que la gestion des ressources naturelles en Afrique fait souvent l’objet de controverses; parce que le pouvoir politique africain manque de légitimité à cause des manipulations d’élections dont il est fréquemment accusé; parce que des hommes à des postes de responsabilités politiques et, pratiquement sortis du néant, deviennent subitement riches sans pour autant être en mesure de justifier l’origine licite de leurs biens; parce que les détournements de deniers publics et autres sacandales financiers et fonciers sont le lot de l’homme politique africain, l’Etat africain est fragile.

Il manque ainsi d’autorité sur une population qui a fini de lui retirer toute crédibilité. On en arrive à une situation où les populations vont jusqu’à douter de l’existence même d’une quelconque pandémie, pensant que l’État dont elles sont concaincues qu’il a cessé depuis belle lurette de se préoccuper de leur bien-être, abuse maintenant du seul bien précieux qui leur reste: leur liberté de mouvement, condition sine-qua-non de leur existence, si ce n’est de leur survie.

Il y a donc bien évidemment quelque chose qui se passe parallèlement à la pandémie. C’est une question à laquelle nous devons porter une réflexion attentive. Il s’agit de la problématique de la légitimité qui, elle seule, garantit la confiance qui est le préalable à tout système de gouvernance. Car, comment gouverner sans autorité et comment avoir de l’autorité sur une population convaincue de la mauvaise foi et du manque d’intérêt de ses dirigeants quant à son devenir? Telle est, il me semble, l’urgence à laquelle nous devons faire face pour nous éviter pareilles contingences en d’autres situations improbables mais possibles au terme de l’histoire.

Tout compte fait, l’État africain semble avoir abdiqué face à la pandemie, incapable d’exercer son autorité qui ne peut puiser sa source ailleurs qu’en la confiance de son peuple. Il est donc désormais envisageable que la pandémie prospère en Afrique plus qu’ailleurs à cause de l’incapacité de nos dirigeants à retrouver la confiance de leur peuple, seul gage d’une obéissance civile.

Pierre Hamet BA

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