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SEXE, ARGENT ET PASSION: LE POPULISME JUDICIAIRE.

Sans qu’on ne s’y intéresse de plus près, il y une volonté populaire de plus en plus manifeste d’infléchir la justice d’un côté ou de l’autre, selon les cas. Nous l’avons vu dans les affaires Idrissa Seck et Salif BA contre Etat du Sénégal (2005) ; Cheikh Yérim Seck contre Aissatou Tall (2012), Karim Wade contre Etat du Sénégal (2013) ; et, Adji Sarr contre Ousmane Sonko (2021). N’est-ce pas socialement significatif ? Tout se passe comme si une affaire judiciaire ne défraie la chronique que quand il s’agit d’argent et/ou de sexe. Et, quand on y ajoute la politique, on obtient alors un cocktail explosif qui déchaîne les passions.

Politique, argent, sexe et passion sont pour ainsi dire devenus les principaux contenus médiatiques sénégalais au détriment de tout ce qui aurait pu contribuer à l’avènement d’une conscience citoyenne responsable. Est-ce à dire que le Sénégalais n’est passionné que par l’argent, le sexe et la politique ? Qu’en sais-je ? Mais à coup sûr, l’on peut aisément se rendre compte que les réactions que suscitent l’affaire Ousmane Sonko contre Adji sarr ont, jusque-là, battu tous les records à tous les niveaux. Est-ce alors parce que cette affaire centralise tous les ingrédients passionnels du Sénégalais ? On y parle pêle-mêle de complot politique, de déloyauté envers les institutions, de sommes d’argent proposées pour taire ou orienter des témoignages, de tentative de chantage, de magistrats corrompus, de justice à la solde de l’exécutif… Bref, on y parle de tout, sauf de l’essentiel.

Ainsi, des individus pas du tout liés à l’affaire semblent se porter volontairement protagonistes. Du jamais vu ! Ils y cherchent sans nul doute une occasion inédite de se faire voir, entendre, connaitre et reconnaitre. Qui les connaissait auparavant ? Personne ! Et chacun semble y avoir trouvé son heure de gloire. D’aucuns au nom de la cause féministe, d’autres au nom de la religion et de leur vérité, et bien d’autres encore au nom du militantisme politique. Il faut bien alors savoir que les informations véhiculées çà et là sont mues par des motivations subjectives dont les auteurs se contentent d’une toute petite heure de gloire pour satisfaire leur égo. La question se pose dès lors de savoir d’où nous viennent toutes ces informations et à quelle fin tente-t-on de soumettre aux sénégalais des faits dont les origines et les circonstances sont tues pour tenter d’infléchir sinon de réclamer une décision de justice avant même son heure.

Pour peu que l’on soit donc serein et averti, l’on peut aisément se rendre compte que dans cette affaire, le bureau du juge instructeur semble être grandement ouvert au public au moment des auditions tant et si bien que tout Sénégalais semble être au fait du moindre détail du dossier. Dès qu’il y a une audition, les médias semblent y avoir été physiquement présents. Ils ne prennent ainsi aucune distance déontologique par rapport à l’affaire. Les avocats des parties concernées, devenus fer de lance de la bataille médiatique, s’adonnent tout aussi laborieusement à l’exercice difficile de la communication publique sans en maîtriser les techniques. Ainsi donc, ils se livrent à ce qui pourrait être assimilé à du populisme judiciaire, perdant ainsi de vue la retenue éthique que leur impose leur profession. Et, c’est bien en cela que se trouve toute l’obsolescence du système judiciaire qui ne permet ni au magistrat instructeur, ni au parquet de communiquer ainsi que le font les parties et leurs avocats.

Or, en observant un silence assourdissant face aux déclarations publiques de l’une ou l’autre partie, les sénégalais finissent par consommer sans précaution toute information supposée émaner du dossier et relayée ainsi par une masse médiatique en roue libre. C’est vieux comme le monde: à force de n’entendre qu’un seul son de cloche, on finit bien entendu par penser que c’est le bon son. Si alors un son de cloche tout à fait différent venait à retentir sur le tard, il ne trouvera aucun écho favorable et sera ainsi considéré comme une agression sonore.

L’accusation de viol contre Ousmane Sonko ne doit donc pas du tout être traitée comme un vulgaire fait divers où l’on jette en pâture l’une ou l’autre partie selon que l’on est pour ou contre ? Tout au moins cette affaire met dos à dos l’opinion et le respect du formalisme juridique qui doit maintenant s’adapter à la médiatisation à outrance des affaires judiciaires.

Pierre Hamet BA.

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