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KARIM, JE NE T’AIME PAS !

« Quand le déshonneur est public, il

faut que la vengeance le soit aussi ». 

Beaumarchais – (Le Mariage de Figaro)

 

Karim, Karim, Karim ; avec toi, je serais insatiable. Fils de Maître Abdoulaye Wade que l’on aura tant chéri et détesté dans l’histoire politique contemporaine du Sénégal, je te hèlerai trois fois.

RUMEURS. Sur toi, l’on m’aura tout dit : tu serais français ; tu ne parlerais pas bien wolof ; tu n’aurais pas beaucoup de considération pour nous autres autochtones ; tu préférerais les professionnels européens aux nationaux ; tu serais éloigné du petit peuple ; tu aurais usé de ta condition de fils-à-papa pour illégalement encaisser 10% sur tous les investissements entrant au Sénégal cette dernière décennie ; tu aurais voulu succéder à ton père au sommet de l’Etat comme si nous n’étions que de triviales indigènes dans une royauté où tu serais le prince-héritier ; et, apothéose, l’on me dit maintenant que tu serais propriétaire de DP World Sénégal, de la Banque Marocaine du Commerce Extérieur, de la compagnie AHS. A vrai dire Karim, d’avoir soustrait plus du quart de notre famélique budget annuel national, si tant est qu’il est strictement vérifié que, de ce qui précède, tu serais effectivement coupable d’enrichissement illicite à hauteur de 694 milliards CFA, te rend fort détestable à mes yeux.

KARIM, à force de n’entendre qu’un seul son de cloche, on finit par croire que c’est le bon son. Mais si ce son relève plus d’une dissonance dans l’aubade globale de la réalité politique quotidienne ainsi que le soutiennent tes rarissimes partisans, alors il faudra, à un moment ou à un autre, une note de ta part qui s’accorderait ou se disjoindrait de la symphonie. Bien entendu, le silence est une forme de communication. Mais à y abuser, il devient de l’ignorance. Et, l’ignorance est le pire des mépris. Ma haine en toi ira donc en grandissant aussi longtemps que tu me négligeras. Tant que tu ne daigneras pas t’adresser à « Moi, le Sénégalais » pour enfin faire entendre une petite note bien singulière qui m’illustre de ta propre voix que tu te soucies de mon opinion ; oser ainsi apporter l’amalgame dans la sérénade qui exacerbe l’inimité que je nourris à ton égard, tu m’ancres à croire que tu me portes une mésestime sans précédent. En conséquence de quoi, je me réjouirais de ta privation de liberté.

VENGEANCE. Mais ce n’est que le mésentère du tableau que dessus. Macky Sall, alors président de l’Assemblée nationale, a voulu t’entendre sur ta gestion des fonds de l’Organisation de la Conférence Islamique. Par un tour de passe-passe politique, il a été défenestré du système. Maintenant qu’il est devenu Président de la République, c’est chose faite. Mais à force de propagande, de vacarme médiatique, de cacophonie au sein du gouvernement qui peine à trouver un consensus minimal, le plat qui, froid devait se manger, a tellement été réchauffé qu’il a fini par cramer. Il faut alors s’en débarrasser car c’est devenu infect et impropre à la consommation. Ça ne passe plus. Donc, il ne reste plus qu’une issue artificiellement valable : te jeter en prison.

PEINE PERDUE parce que « Moi, le Sénégalais » n’accorde plus que très peu d’attention à la question. A la fin de l’histoire, que tu te sois illicitement enrichi ou pas, que tu sois raciste et malhonnête ou que tu veuilles devenir président, ne remplit point ma besace. En vérité Karim, si ce ne sont les rumeurs qui te dépeignent comme le plus altier des Sénégalais sans que tu n’y apportes la moindre contradiction sinon qu’à travers la voix de ce qui n’ont point de voix audibles, envers toi, « Moi, le Sénégalais » n’a ni amour, ni haine.

FIN DE L’HISTOIRE. Ce qui m’importe, ce qui me motive, ce qui m’anime, ce qui, au plus profond de mon être, me préoccupe : c’est l’amélioration de ma condition tant et si bien que tout ce qui se rapporte à ladite traque des biens supposés mal acquis n’est devenu que distraction à mon sens. Alors que l’histoire prenne fin pour qu’enfin « Moi, le Sénégalais » puisse me rendre compte de ce dont ces gens sont véritablement capables face aux multiples afflictions meurtrières qui m’acculent au jour le jour sans qu’ils ne daignent s’y consacrer, prétextant s’occuper d’une demande sociale singulière, formulée à ma place par une cohorte de politiciens incompétents envenimés par une société civile fortement politisée.  

Pierre Hamet BA

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FRANÇOIS LE PAPE

« Aussi longue et aussi noire que soit la nuit, il vient

toujours un moment où, enfin, le jour se lève »

Oumar Sankharé – « La Nuit et le Jour ». 1997.

Tout commence par certains signes précurseurs très tôt arrivés au sein de l’Eglise. En signant, le 8 janvier 1454, la bulle Romanus Pontifex, pour donner mission à Alfonso V, roi du Portugal, d’évangéliser les autres peuples autour de la terre, Nicolas V, le 208e pape, venait d’accomplir un acte dont l’un des enseignements est l’élection avant-hier du 266e pape de l’Eglise. C’est authentique et historique dans la mesure où le premier évangéliste qui porte désormais le sacerdoce de ramener à la foi un Occident plus que jamais agnostique, mécréant voire athée, de réunir et de ressouder une communauté chrétienne qui s’effrite de plus en plus, de surélever les murs d’une cité pontificale surmédiatisée et enfin de prêcher le message de la paix, de l’amour et de l’amitié entre les créatures de l’omnipotent, descend d’un peuple, par le passé, colonisé et évangélisé par le feu et par le sang. Il n’est donc qu’enrichissant de tirer les enseignements d’une telle rupture.

APOCALYPSO. Le troisième millénaire est jusque-là marqué par de nombreux événements politiques, économiques, sociaux et culturels qui ont presque fini d’ébranler les croyances et les certitudes : la guerre contre le terrorisme sur fond de croisade qui s’étend jusqu’aux confins de nos frontières à l’heure où l’on croyait avoir définitivement neutralisé le choc des civilisations ; la crise économique qui sonne définitivement la fin du monde unipolaire et accélère considérablement l’avènement d’un monde multipolaire voire apolaire ; l’accroissement de la pauvreté aussi bien dans les pays en développement que dans les pays développés ; la poignante disparition de Jean-Paul II, titulaire du plus long pontificat après celui de Pie IX, laissant le monde sans grande figure emblématique qui aurait pu éviter, si ce n’est mettre fin aux incompréhensions qui accentuent la haine entre les religions ; le printemps arabe qui sonne comme une renaissance du monde arabo-berbère encore pleine d’incertitudes ; la guerre en Syrie qui, à la table des Nations-Unies, continue d’étirer le fil déjà ténu de la diplomatie internationale ; le recul de la part de la foi dans le système d’ »habitus social » occidental qui envenime la nature humaine ; les scandales et procès qui ont dernièrement animé l’actualité autour de l’Eglise, l’incompréhension grandissante des peuples autour de la terre qui alimente un intégrisme de plus en plus incontrôlable, la question du nucléaire iranien qui enrégimente juifs et musulmans, les tensions qui se raniment entre les deux Corées… Et voilà que surgit du coin de ce tableau ténébreux, une petite lueur à la lumière si vive qu’elle éclaire de sitôt les plus sombres présages d’une apocalypse imminente.

SA SAINTETE FRANCOIS. Vint donc le sauveur qui se place dans le sillage de San Francesco d’Assisi, communément appelé François d’Assise que le pape Innocent III a vu en rêve soutenant la basilique Saint-Jean de Latran, alors en ruines. Le rapport est politiquement significatif et spirituellement chargé de sens. François d’Assise a diplomatiquement convaincu le sultan Malik al-Kamil de rendre Jérusalem au Chrétien alors qu’aucune force ne l’y contraignait. Ce que les armées venues d’Europe n’avaient pu obtenir, son intelligence et sa tolérance le lui ont attribué. En se nommant François, Sa Sainteté le Pape marque une rupture d’avec les pratiques contemporaines où l’ostentation a pris le dessus sur le sens. Il annonce ainsi qu’il entend continuer le travail de François d’Assise qui désirait ardemment tisser des liens entre les musulmans et les chrétiens pour bâtir la paix. Il suggère dors et déjà une réflexion active sur l’ouverture vers les autres cultures et les autres religions afin de diminuer les tensions, les intolérances et les incompréhensions.

BENEDICTION. Ce pontificat aura donc vraisemblablement une influence certaine sur la manière dont les relations internationales vont dorénavant se jouer. Qu’il en soit ainsi que le Pape le proclame. « … Prions toujours pour nous : l’un pour l’autre. Prions pour le monde entier afin qu’advienne une grande fraternité. (…) Que ce chemin que nous commençons (…) soit fructueux… ». Sa Sainteté Le Pape François sera, comme son homonyme, entièrement dévoué à la lutte contre la pauvreté et au raffinement des mœurs. Sa première adresse qui initie avec beaucoup d’humanisme et d’humilité « … ce chemin (…) qui est celle qui préside toutes les Eglises dans la charité… » nous en donne l’assurance.

Pierre Hamet BA

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ET QU’EN PENSE LE PDS ?

« Les grands hommes sont ceux dont les fautes

ne comptent pas. Leur perte même les exhausse. »

Paul Valéry. « Mélange », juin 1941

Le 09 juillet 2004, Mahmoud Saleh portait un coup de poing à un garde pénitentiaire, en tenue, en faction et en service. En pulvérisant un agent des services publics dans l’exercice de ses fonctions, il frappait concomitamment l’Etat de son poing. Arrêté et mis en garde à vue, les opposants d’alors avaient crié à la détention arbitraire. Organisations non gouvernementales, partis politiques et autres associations se réclamant de la lutte pour les droits de l’homme avaient pris d’assaut la place publique, dénonçant une déliquescence de la démocratie au Sénégal. Mais dans les faits, Mahmoud Saleh était indéfendable. Si alors on a pu prendre partie pour lui dans un cas de flagrant délit, pourquoi ne pourrait-on pas s’opposer fermement au pouvoir en place qui semble de plus en plus mépriser nos préoccupations ?

Le Parti démocratique sénégalais (Pds) est devenu inaudible, indolore et incolore. Ses principaux leaders ne s’expriment qu’en tournant sept fois la langue avant de se taire. Ils tentent vainement de nous convaincre d’être victimes d’une injustice. Envoûtés par les poursuites engagées à leur encontre, ils en arrivent à perdre de vue leur mission principale de régulateur du jeu démocratique. Ils se laissent emprisonner dans un mutisme sans précédent alors que les mêmes inquiétudes que leurs adversaires prétendaient pouvoir solutionner une fois au pouvoir, ont demeuré jusqu’à devenir chronique.

En vérité, il ne se passe pas un jour sans que le gouvernement ne pose un acte révoltant allant de multiples exactions tendant à nous enlever le pain de la bouche à une forme de ghettoïsation du pouvoir : destruction de biens privés puis déguerpissements des ateliers de fabrication sans aucune espèce d’indemnisation ou de plan de recasement ; nomination d’un étudiant au poste de Consul général du Sénégal à Marseille, des enfants de l’homonyme du Président de la République à des postes stratégiques comme Agent judiciaire de l’Etat, Ministre-conseiller ou encore Président de conseil d’administration ; interdiction d’exportation de ferraille pour satisfaire une entreprise chinoise ; baisse de la piteuse pension de retraite ; implication du Premier ministre dans l’affaire Habré sans que sa démission ne soit de rigueur ; deux permis d’exploration pétrolière octroyés au frère du Président de la République, un journaliste de son état… la liste est longue sans être exhaustive.

Tant de faits qui justifient, entre autres, la récente baisse de popularité du Président de la République (Isop) et qui auraient pu fortement motiver une opposition engourdie. Mais au lieu de se concentrer sur les intérêts de la population et de contrôler pour ainsi dire l’Action publique, d’aucuns se consacrent à des stratagèmes pour une place au soleil de l’avenue Roume, d’autres se préoccupent d’éviter une place à l’hôtel zéro étoile de Rebeuss. Et pendant ce temps la condition sociale du Sénégalais s’empire, au jour le jour, sans qu’aucun opposant n’en fasse véritablement sa raison d’existence ou de résidence médiatique. Or, il y a seulement un an, une pénurie de gaz, une augmentation du prix à la pompe, une inflation des denrées de première nécessité auraient vite défrayé la chronique. Tous les chefaillons de l’opposition se seraient engouffrés sur la brèche, prétendant lutter pour de meilleures conditions de vie de la population. Bravant les interdictions de marche du préfet de Dakar, ils auraient, au prix de leur vie s’il le fallait, arpenté les rues et artères de Dakar, semant désordre et troubles à l’ordre public. Ces mêmes leaders sont pourtant aujourd’hui au pouvoir. Cependant, les mêmes phénomènes conjoncturels, les mêmes entraves au bien-être, à la justice, à la liberté d’expression, au droit de l’homme subsistent. Mais ils n’en ont cure.

Il ne s’est donc jamais agi pour les opposants d’hier, gouvernants d’aujourd’hui, du Sénégalais. En ne parlant plus de nos préoccupations, ils démontrent que leur objectif ne consistait qu’à prendre le pouvoir pour des fins qui se dessinent au fur et à mesure et dont les traits deviennent de plus en plus appréhensibles à nos yeux. De même, en plaçant l’ancien régime à l’épicentre de leurs discours et actions politiques, ils jettent l’anathème sur le choix porté sur eux et brisent ainsi le principe de continuité du service public. En essayant de passer sous silence les dysfonctionnements manifestes de Benno Bokk Yakaar qui plombent tous les secteurs du pays, ils dissimulent confortablement leurs tares sous une belle parure. En ne présentant en définitive que leurs belles facettes, dépourvues cependant de contenus apparents, ils laissent entendre que la coalition qui a produit un tel pouvoir est, elle aussi, belle, et qu’elle aussi, manque de contenus cachés. Mais si après tout, la situation politique qui a produit une telle coalition n’était, en réalité, pas aussi reluisante, alors ladite coalition devait porter en elle un mensonge de la même manière dont Blake (The Sick Rose) dit que la rose porte en elle un ver. Donc, la critique autrefois enchantée par la beauté de la rose, doit maintenant aussi s’intéresser au ver. Les libéraux le savent-ils ? Qui parmi eux pour fouetter les énergies citoyennes et raviver la flamme du refus, et au nom et pour le compte de tous…

Pierre Hamet BA

 

 

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Pourquoi l’Afrique est-elle restée à la traîne?

La pauvreté africaine n’a pas été causée par le colonialisme, le capitalisme ou le libre-échange. Bon nombre des anciennes colonies de l’Europe sont devenues riches précisément parce qu’elles ont maintenu et adapté certaines bonnes institutions coloniales et ont participé au commerce mondial. La pauvreté africaine a précédé la colonisation du continent par l’Europe et persiste encore aujourd’hui. Elle est le résultat de mauvaises politiques, dont la plupart ont été choisies librement par les dirigeants africains après l’indépendance.

Quelques chiffres

Comme l’Europe, l’Afrique a commencé désespérément pauvre. Le regretté Professeur Angus Maddison de l’Université de Groningue a estimé qu’au début de l’ère commune, le revenu moyen par habitant en Afrique était de 470 dollars par an (en dollars de 1990). La moyenne mondiale était à peu près égale à celle de l’Afrique. L’Europe occidentale et l’Afrique du Nord, qui faisaient partie de l’Empire romain, étaient légèrement mieux loties (600 dollars). En revanche, l’Amérique du Nord était à la traîne par rapport à l’Afrique (400 dollars). Dans l’ensemble, le monde était à la fois très pauvre et peu inégalitaire.

Les origines des inégalités mondiales, qui ont vu l’Europe occidentale et, plus tard, l’Amérique du Nord, devancer le reste du monde, peuvent être attribuées à la montée des Cités-États du nord de l’Italie au XIVème siècle et à la Renaissance au XVème siècle. En 1500, l’Européen moyen était environ deux fois plus riche qu’un Africain moyen. Mais le véritable écart de niveau de vie ne s’est creusé qu’après la révolution industrielle qui a débuté en Angleterre à la fin du XVIIIème siècle et s’est étendue à l’Europe et à l’Amérique du Nord au XIXème siècle.

En 1870, alors que les Européens ne contrôlaient pas plus de 10% du continent africain (principalement l’Afrique du Nord et l’Afrique du Sud), les revenus de l’Europe occidentale étaient déjà quatre fois plus élevés que ceux de l’Afrique. En d’autres termes, l’Europe n’avait pas besoin de l’Afrique pour être riche. L’Europe a colonisé l’Afrique parce que l’Europe était justement prospère et, par conséquent, plus puissante. Ici l’analyse de la chronologie des événements ne signifie ni justifie, ni ne défend le colonialisme ; mais elle nous aide à expliquer ce phénomène.

L’impact de la colonisation

Les fortunes de l’Afrique sous la domination coloniale ont varié. Beaucoup de progrès ont été réalisés en termes de santé et d’éducation. Maddison estime qu’en 1870, il y avait 91 millions d’Africains. Dans les années soixante, période des indépendances, la population africaine a plus que triplé pour atteindre 285 millions. L’OCDE estime qu’au cours de la même période, la part de la population africaine scolarisée est passée de moins de 5% à plus de 20%. En revanche, les Européens ont traité les Africains avec mépris et les ont soumis à l’esclavage, la discrimination et à la violence. Cette violence s’est intensifiée pendant la lutte pour l’indépendance de l’Afrique, alors que les puissances coloniales essayaient de repousser les nationalistes africains. En conséquence, les dirigeants africains ont pris le contrôle de pays où la répression de la dissidence politique était déjà fermement établie. Au lieu d’abroger les lois sur la censure et la détention arbitraire, les dirigeants africains les ont conservées et les ont développées.

La tentation soviétique

C’est précisément parce que la domination coloniale était si dégradante sur le plan psychologique envers les Africains en général, et les dirigeants nationalistes en particulier, que les gouvernements africains post-indépendance étaient si déterminés à éliminer de nombreuses institutions coloniales. Puisque l’état de droit, le gouvernement responsable, les droits de propriété et le libre-échange étaient des transplants européens, ils devaient être abandonnés. Parallèlement, de nombreux dirigeants africains ont choisi d’imiter les institutions et les politiques économiques d’une puissance montante qui représentait l’exact opposé du libre marché occidental et de la démocratie libérale, à savoir l’Union soviétique.

Imiter l’URSS dans les années 1960 n’était pas totalement irrationnel. Au cours des années 1930, le pays a connu une industrialisation rapide, transformant une nation de paysans en une puissance redoutable. L’industrialisation a coûté la vie à quelque 20 millions de personnes, mais elle a permis à l’URSS de triompher de l’Allemagne hitlérienne (au prix de 27 millions de vies supplémentaires). Au début des années 1960, le pays produisait non seulement des quantités massives d’acier et d’armement, mais semblait également prêt à remporter la course scientifique l’opposant à l’Occident, lorsque Youri Gagarine devint le premier homme à atterrir dans l’espace le 12 avril 1961.

Le gaspillage et le retard étonnant de l’économie soviétique ne sont pas apparus avant les années 1970. À ce moment-là, malheureusement, le virus socialiste a infecté une grande partie de l’Afrique, qui a adopté un gouvernement à parti unique, qui a détruit la responsabilité et la primauté du droit, bafoué les droits de propriété et, par conséquent, la croissance. Des contrôles des prix et des salaires ont été imposés et le libre-échange a cédé la place à la substitution des importations et à l’autarcie.

L’histoire d’amour de l’Afrique avec le socialisme a persisté jusqu’aux années 1990, quand, enfin, l’Afrique a commencé à réintégrer l’économie mondiale. Les relations commerciales avec le reste du monde ont été quelque peu libéralisées et les pays africains ont commencé à déréglementer leurs économies, gravissant ainsi les échelons dans le rapport du Doing Business de la Banque mondiale, mesurant la qualité du climat des affaires. Cela dit, même aujourd’hui, l’Afrique reste le continent le moins économiquement libre et le plus protectionniste du monde. C’est là – et non dans le libre-échange – que réside le problème.

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OBAMACKY

« L’égoïsme et la concurrence restent hélas plus puissants

que l’intérêt général ou que le sens du devoir (…) ».

Albert Einstein, in  ̎Comment je vois le monde̎

 

Ils s’empoigneront le 28 mars prochain. L’un, dont les avoirs sont estimés à dix millions de dollars américains, inspire toute une jeunesse. Promoteur de la démocratie, il est Président du pays le plus riche du monde. L’autre est plutôt prêcheur de la bonne moralité sans pour autant être exemplaire, Président d’un tout petit pays sous-développé, pauvre et très endetté. S’il est possible de tracer sans grandes difficultés les biens de l’un, la tâche serait par contre fastidieuse, à la demande légitime de savoir l’origine des possessions de l’autre, de ne pas buter sur des questions qui n’ont point de réponses satisfaisantes.

Décidément ! Il est aussi riche que Barack Obama. Sa fortune équivaut sensiblement à celle du capitaine du navire américain. Il n’est pas ici question de revenir sur l’inventaire complet de son patrimoine ; ni sur l’omission probablement volontaire de la balance de ses différents comptes bancaires; encore moins sur la disproportion manifeste entre ses revenus connus et son patrimoine déclaré officiellement, toutes choses qui, par ailleurs, justifieraient, selon la stipulation même de la Loi, l’ouverture prochaine d’une enquête préliminaire de la Cour de Répression de l’Enrichissement Illicite (CREI); mais de discourir sur le système d’habitus politique à l’œuvre dans notre pays que l’on appelle sarcastiquement démocratie.

OBSÉDÉS DU PLUS. Nos dirigeants se saisissent de la richesse comme condition sine qua non du jeu démocratique qui se résume désormais en une alternance qui ne change pas le fond. La réforme si permanente dans leurs discours donne l’illusion du changement alors que rien ne bouge en réalité. Le phénomène d’enrichissement tous-azimuts métamorphose ainsi la démocratie en un champ de compétences de professionnels. La représentativité politique prend dès lors un sens particulier puisque s’inscrivant dans une logique au sein de laquelle se manifeste une spécialisation et une technicité singulières. Au même titre que le mot mécanicien désigne le professionnel de la mécanique, le mot politicien témoigne de cette professionnalisation des acteurs politiques. A peine arrivent-ils au pouvoir que l’obsession du plus prend le dessus sur le reste. Ils perdent de vue l’essence même du phénomène démocratique. Idéal, idéologie, programme, promesses et convictions sont vite jetés à la poubelle pour laisser place à un schmilblick caractéristique des plus inédits détournements de l’histoire. La démocratie s’en trouve réduite à une façade, un simulacre qui n’a d’autres fonctions que d’assouvir leur soif de richesse. L’accumulation, par le biais d’une redistribution à grande échelle se transformant en clientélisme de masse, est ainsi intégrée comme rouage d’une machine totale, et finalement totalitaire, dotée d’une force irrésistible d’auto-enrichissement qui accentue la pauvreté nationale.

COQUILLE VIDE. Le système d’habitus politique qui encourage cette ruée obsessionnelle vers la richesse met en exergue deux catégories de politiciens sénégalais : ceux qui utilisent l’argent pour avoir la masse ; et ceux qui utilisent la masse pour avoir l’argent. Les élections deviennent l’alpha et l’oméga de la démocratie alors qu’elles ne devraient être qu’un moyen de limiter l’enflure du pouvoir. En se concentrant donc sur la « coquille » au détriment du fond et de la substance, notre modèle démocratique s’éloigne largement des populations. Il ne s’agit plus de donner le pouvoir au peuple mais de donner au pouvoir une justification populaire. Ce modèle « creux » de démocratie dans lequel on met en avant les mécanismes d’organisation et de justification plutôt que les instruments de limitation du pouvoir explique le cumul des fonctions, l’instabilité au sein de Benno Bokk Yakaar et le tabou qui enveloppe la question de la durée du mandat présidentiel. Tout ensemble qui diffère donc du système américain. Erosion démocratique de la démocratie : il n’y a plus d’Etat qui cherche l’intérêt général, mais des hommes d’Etat, obsédés du plus, qui ne se préoccupent que de devenir riches, au détriment de Moi, le Sénégalais.

Pierre Hamet BA

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LE BUDDHA de THIES

« Il n’y a que vous qui sachiez si vous êtes lâche et cruel,

ou loyal et plein de dévotion : les autres ne vous voient

pas, ils vous devinent, (…) car ils voient moins votre

vraie nature que ce que vous en montrez. »  Montaigne : Les Essais – III

Traduction en français moderne,

Volume 3

Depuis le 25 mars, il n’a de cesse de chercher le prétexte de s’opposer au courant de l’Etat-Bateau. Il est un persona dans la société du spectacle. Brillant, il impressionne par le luxe de l’érudition mais propose des théories souriantes. Ses projets et sa vision du monde sont autrement plus complexes. Il se veut méthodique, rigoureux, prospectif, soucieux de la moralité et du respect de ses engagements. Il serait, pour ainsi dire, marqué par le goût de la logique. Il donne l’impression d’aimer les règles, la symétrie, les démonstrations. Parfois superstitieux, il attache à des éléments accessoires une importance particulière d’où le tour souvent compliqué et paradoxal de ses entreprises. Jadis pressé, impatient, en retard, il a passé son temps à faire des plans. Conforté par une certaine morale et un prétendu souci de perfection, il se considère comme sérieux, responsable, consciencieux. Il dit aimer ce qui est droit et pur et prétend être en accord avec les lois. Sans se considérer comme supérieur, il s’affirme comme un champion de la normalité. A l’inverse, il considère les autres comme irresponsables, insouciants, légers. Ayant crainte que les tâches commandées ne soient pas bien exécutées, il surveille constamment ses proches et ses subordonnés. Ce regard de contremaître est aussi un regard curieux. Il veut être parfait dans tous les domaines : dans l’ordre matériel et professionnel où tout doit être rangé et achevé ; dans l’ordre moral où il faut suivre les préceptes ; dans l’ordre social où il faut respecter les convenances. 

HISTRION. Il parle sans cesse de lui mais perd son identité. L’expression de ses affects est bruyante, labile, superficielle, mobile, abondante et confuse, fort dépendante des circonstances et des rencontres. Pleurs, rires, colères, embrassades, malédictions et réconciliations se succèdent avec rapidité dans ses relations. Souvent sympathique, parfois déroutant, volontiers égoïste, son style cognitif répond à l’urgence de la séduction. Il n’a guère le temps de penser, de réfléchir, d’aligner les arguments. Sa séduction plus ou moins efficace l’en dispense : en quelques phrases, sourires et formules coraniques, il a déjà convaincu ses interlocuteurs. Il use d’impressions subjectives, rapides, intuitives, ne signifie jamais le détail et ses projets demeurent dans des globalités entièrement floues. 

NARCISSIQUE. Sa vision de lui-même est ambivalente. Il n’a de cesse de vanter ses mérites. Il ne se juge pas beaumais il se trouve irrésistible, séducteur. Cette auto-hagiographie ambulante et ce rideau de croyances vantardes décèlent toutefois un doute douloureux et profond quant à de telles affirmations. La vision des autres est complémentaire pour lui. Cela induit des préoccupations du genre « sont-ils là pour m’admirer tels des amateurs d’art un soir de vernissage ? ». 

Ande Pathio Rewmi. Né pour être président selon sa propre conviction, sa participation à Benno Bokk yakaar ne pouvait donc qu’être éphémère. Il n’a soutenu la coalition anti Wade que parce qu’il ne voulait pas se mettre à dos l’opinion. Il ne se représente l’intouchable que comme un usurpateur ayant au passage profané sa fameuse trilogie 4-4-44. Ses agissements au sein de la coalition présidentielle répondent donc à une urgence. A défaut d’être le 4e président, il croit fermement devoir en être le 5e. Ceux qui s’en émeuvent font semblant d’ignorer qu’il n’a jamais caché son ambition de gouverner le Sénégal ; Ou alors, ont été dupes de penser qu’il aurait mis fin à ses ambitions présidentielles. En prenant donc le contre-courant des yakaaristes, il sonne la fin de l’hypocrisie au cœur de l’Etat-Bateau et installe le pays dans ce qu’elle connait le mieux : une politique lancinante, sans fin, qui place la population à la périphérie des objectifs pour ne satisfaire que de villes monomanies subjectives. Et c’est bien en cela, fort malheureusement, qu’excelle le buddha de Thiès. 

Pierre Hamet BA

22 Février 2013

 

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REALPOLITIK

«Lorsqu’une longue suite d’abus et d’usurpations

(…) marque le dessein de soumettre (les hommes)

au despotisme absolu, il est de leur droit, il est de

leur devoir de rejeter un tel gouvernement et de

pourvoir, par de nouvelles sauvegardes, à leur

sécurité future ».

Extrait de la Déclaration d’Indépendance

des Etats-Unis d’Amérique. 04 Juillet 1776

Traduction de Thomas Jefferson,

3e Président des Etats-Unis

Nous sommes en crise ! Pas une édition de journal télévisé ne passe sans que le citoyen en appelle à l’Etat. Pas un article rédigé dans la presse sans que l’Etat ne se pose au secours d’une région ou d’une catégorie de personnes en difficulté. Sous prétexte d’assurer, du haut de leur expérience mi-centenaire, une mainmise sur un ensemble de rouages vague mais complet ; sous prétexte de s’infiltrer lors des assises nationales dans tous les domaines du quotidien pour mieux les gérer ; sous prétexte de servir cette notion creuse d’Intérêt général, l’arche de l’Etat dérive dangereusement. A force de s’ingénier à imprimer aux institutions une antithèse avérée de ce que préconise la realpolitik, le système du navire ne se grippe désormais plus ; il échoue tout simplement sur la plage de l’inconséquence. Les pires présages trouvent ainsi un écho percutant. Echo impatiemment attendu par une troupe, encore peu nombreuse, de personnes sensées. Echo amèrement constaté par des dirigeants trop prompts à dénoncer les dérives abstraites d’un système dont ils ont tous été, à un moment ou un autre, acteurs. Echo tristement subi par une masse noyée dans une propagande institutionnalisée jetant abondamment le discrédit sur le PDS par cette traque à l’œuvre alors qu’elle n’a jamais été aussi statique.

Les méandres des détresses sociales, économiques et politiques actuelles ont le mérite de révéler la vérité à une majorité électorale dépassée par l’ampleur du désastre cancérigène. La cellule s’est dégradée et commence maintenant à communiquer à la Nation son programme de dégénérescence. Les hommes et les femmes dont l’ignorance sans but vient de se briser, telle une écume insensée, sur la digue des incohérences d’un système rouillé, cherchent, affolés, à remédier à la pathologie. Mais, les cancéreux sont ceux qui se complaisent à apporter des remèdes primitifs dont la posologie frôle le degré zéro du soulagement. Aujourd’hui l’Etat-bâteau est allé encore plus loin et les cellules cancérigènes grouillent en lui. Qu’il suffise pour s’en convaincre de songer à ce chapelet de promesses défiant l’entendement : Cinq cents mille emplois sur sept ans ; trente mille projets à financer annuellement, l’attribution farfelue d’une bourse familiale ou d’une allocation quelconque. Pour autant, le pire demeure moins dans les impacts directs sur l’économie que dans les conséquences intellectuelles et morales ! De telles méthodes condescendantes ne font que favoriser, d’une part, l’infantilisation d’une population qui s’en remet au Saint-Etat-de-rupture ; et d’autre part, le conditionnement des esprits qui, par réflexe, se raccroche à l’Etat au moindre bobo ressenti par le corps social. Qu’à cela ne tienne ! L’Etat est là. L’Etat est toujours là pour nous aider. L’Etat nous donne de l’argent pour combler l’irresponsabilité ambiante. L’Etat nous dicte notre conduite. L’Etat nous fait marcher au pas. L’Etat nous fond dans ce moule de citoyen moyen pour pallier ses manquements. L’Etat s’est affiché comme le seul pilier incontournable. Ce n’est pas rien !

J’ACCUSE. Quel journal publierait donc un retentissant « J’accuse » d’un Émile Zola contemporain comme le fit l’Aurore durant l’affaire Dreyfus ? Les sujets d’indignation ne manquent tout de même pas ! Depuis les libertés d’un procureur spécial sur la protection des droits de la défense jusqu’à la démission fracassante du ministre du commerce, de l’industrie et du secteur informel ; sans parler des conditions moyenâgeuses des paysans, pêcheurs et éleveurs sénégalais, des comportements haineux envers les hommes d’affaires, des pressions exercées pour étouffer toute voix dissidente envers le nouvel ordre établi, de l’absence, jusqu’à présent, de réelles preuves contre les prévenus politiques, de l’acharnement, devenu scandaleusement ignominieux, du pouvoir à vouloir démanteler le Parti démocratique sénégalais. Jamais le discours médiatique et politique n’a semblé aussi embarrassé et peu crédible. Où sont donc nos intellectuels ? Pas ceux qui, abonnés aux émissions de grande écoute, avalisent et dissèquent le message officiel, comptent les points, de part et d’autre, tout en se réfugiant derrière une confortable «neutralité» proportionnelle à l’assiduité des médias à leur égard. Mais plutôt ceux qui souffrent de cette espèce d’indifférence politique dont on a rendu la démocratie responsable prétextant que la masse n’est pas faite pour comprendre.

Il y a trop à faire pour qu’il ne soit pas indispensable de tenir perpétuellement mobilisées nos énergies sociales. La période critique ouverte par la chute de l’ancien régime n’est pas close. L’heure du repos n’a pas sonné. L’essentiel est de ne pas nous laisser retomber dans l’état de stagnation morale où nous nous sommes trop longtemps attardés. Il vaut mieux en prendre conscience que de s’abandonner à une sécurité trompeuse. Socrate a payé de sa vie l’influence de ses idées sur la scène sociale et politique d’Athènes. Platon a placé les sages et les philosophes au sommet de sa pyramide républicaine. Aristote était le conseiller et le mentor d’Alexandre le Grand. Cicéron était au cœur de l’arène politique de Rome. Camus et Sartre mobilisaient les rues. Nos intellectuels doivent donc crier ce qui ne va pas et cesser de glorifier ce qui va. Leur rôle est d’utiliser les savoirs auxquels ils ont accès et les synthèses auxquelles ils arrivent pour interpeller, questionner, critiquer ; ce qui n’est ni dénigrer, ni diffamer ; et quand le moment vient, abjurer. Mais il y en a peu ou prou qui en sont manifestement capables. L’alternative est donc posée : ou bien l’opposition prend la mesure du sacerdoce tel le déroutant Maître Abdoulaye Wade, alors opposant redoutable. Ou alors – et c’est le cas le plus probable -, à jet de pierres et de senteur de pneus enflammés, le peuple prend son destin en main et s’oppose violemment à ce qui semble de plus en plus s’éloigner d’une politique réaliste soucieuse, avant tout, de l’intérêt national au sens où Bismark entendait la realpolitik.

Pierre Hamet BA

14 Février 2013

 

 

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DESPOTE DE L’INCESTE

Va chercher des amis dont l’estime funeste honore

l’adultère, applaudit à l’inceste»      RAC. Phèd. IV, 2

Du moment du choix, la présidentielle est devenue le temps de la chasse. Travaillistes essoufflés, communistes en détresse, socialistes aux abois, politiciens de circonstance, activistes malséants, intellectuels de pacotille, starlettes en mal de popularité, avocats en obsolescence, artistes incultes, hommes de culture constipés du cerveau ; tous, des ennemis jurés aux adversaires à couteaux tirés, ont sacrifié à la battue quinquennale. Et, de cette alliance incestueuse est née Benno Bokk Yakaar. Hypocrisie, je proclame ; et comédie, devraient attester tous ceux qui se rendent compte aujourd’hui que les gouvernants s’occupent moins des attentes du peuple que de maintenir l’ordre de l’inceste. Passée la période de la chasse, cette sorte d’assentiment fortuit qui, temporairement, passait sous silence les ambitions des uns et des autres le temps d’un tir groupé, ne pouvait que laisser place aux péchés capitaux. 

Orgueil, avarice, envie, colère, luxure, paresse et gourmandise mais aussi amateurisme, despotisme et népotisme infectent désormais l’intouchable. Quand bien même nous n’en voudrions certes pas, d’avoir confondu choix et chasse, il est tout de même là. Son discours est vide ; ses entreprises, indigentes ; et sa vision, brouillée. Au gré des contingences, il concocte une sorte de mélasse aux allures de plans sur la comète qu’il décline sous la forme d’un programme de gouvernance. Ingénieur mais pas du tout ingénieux, sa recherche de l’originalité l’égare dans de multiples atermoiements, s’il ne s’en trouve pas ridicule. Pour accoutrer le vide de l’inceste, il fait appel à de biens vagues notions. Conseil des ministres décentralisé par-ci ; restauration des valeurs de la République par là ; levée des couleurs désormais imposée ; traque des biens, dit-on, mal acquis ; transparence ; bonne gouvernance et que sais-je encore… Tout ensemble qui n’a nuls autres impacts que de nous soûler de galimatias pour dissimuler, sous un monceau de mensonges, l’inceste qui putréfie la République. 

N’ayant pas encore satisfait à une seule des exigences sociales concrètes qui l’ont confortées au pouvoir, il s’attèle désormais à une mission civilisatrice comme si nous n’étions qu’une triviale population qu’il convient d’enseigner les bons usages de la République. Ce dont nous parlons ici, c’est de cette prétention à décréter la décadence des valeurs de la République au tréfonds de notre être et de prétendre vouloir y apporter un simulacre de réparation. Mais pour être efficace plutôt que populiste, une telle entreprise devrait commencer par une politique d’accès et de maintien à l’école pour tous ; le retour dans le programme d’enseignement de l’instruction civique et de l’éducation morale et sanitaire avec un fort coefficient au primaire, au collège et pourquoi pas au lycée. De la sorte, l’on insufflerait d’une part, l’avènement d’une nouvelle conscience civique, morale et sanitaire chez nos jeunes gens ; et d’autres parts, l’on résorberait une partie du chômage des enseignants en en reconvertissant certains dans l’instruction de ladite matière. Ce n’est pas en observant la levée des couleurs une fois par mois, ni en poursuivant bruyamment des dignitaires de l’ancien régime, encore moins en baladant le gouvernement de région en région qu’on arrivera à renforcer l’esprit citoyen et la moralité de nos populations. 

CONSPIRATION. Tout cela n’est donc que vacarme pour peu et relève plutôt d’un obscurantisme avéré. Les actions actuellement entreprises ; que ce soit ladite « traque des biens mal acquis », ou « la restauration des valeurs de la République » etc. manquent de contenus apparents en ce sens qu’elles n’ont aucun fondement scientifique ou juridique établi. Elles partent d’un supposé sentiment national injustifié, alimenté par une certaine propagande, qui a fini de convaincre nombre d’entre nous que le Sénégalais manque de civisme, d’esprit citoyen ; que le Sénégal a régressé ; et que Wade a fout. le b..del. Or, il n’en est rien. De tels arguments ne sont destinés qu’à engendrer la peur dans les populations afin de les paralyser et permettre ainsi aux mouvements subversifs de s’emparer des leviers de commande de l’Etat. Les propagandistes ont ainsi attaqué les personnalités et responsables politiques. Ils les ont discrédités soit à l’aide d’affaires montées, soit encore en révélant des malversations et comportements « scandaleux ». Lorsque la chasse aux sorcières a alors commencé, se mobiliser pour défendre la justice dont a droit tout citoyen a revêtu le sens de prendre des risques, de faire des efforts pour des gens qui n’en valent pas la peine. Ce mutisme populaire et cette paralysie nationale engendrés par cette dite propagande expliquent à plus d’un titre les caprices fantaisistes de l’Etat. 

Parce qu’on ne dit pour le moment rien, les propagandistes d’hier, les mêmes à présent au cœur du pouvoir, nous pensent naturellement acquis à cette démarche obsolète qui se complait dans des discours correctionnels dépourvus de sens civique et moral ainsi que de contenus techniques et scientifiques. En devenant donc au bout de ce petit matin de mars cette « foule bavarde et muette » (Césaire), nous acceptâmes la conspiration incestueuse qui entretient le despotisme et le népotisme au sommet de l’Etat. Le moment est donc venu d’agir. Le statu quo, dans sa forme incestueuse, est arrivé à expiration. La nature reprend ses droits. Et, l’on voit pointer les dissensions qui annihilent l’inceste :

La convoitise est le propre de l’homme politique.

 Pierre Hamet BA

08 Février 2013

 

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Yoonu Yakutté

« La véracité n’a jamais figuré au nombre des vertus

politiques, et le mensonge a toujours été considéré comme

un moyen parfaitement justifié dans les affaires politiques. »     Hannah ARENDT

NOUS VIVONS MAINTENANT DANS UNE SOCIETE où il n’y a que le résultat qui compte. L’on nous juge en fonction de notre appartenance politique, de notre confrérie religieuse ou de notre avoir. Peu importe de voler, de mentir, de vendre son âme au diable, de retourner sa veste, d’hypothéquer la vie de ses enfants, de souiller son corps dans l’homosexualité et la pédophilie, de trahir ses proches pour son intérêt propre, de baigner dans l’hypocrisie, de mystifier le peuple, d’abuser du pouvoir, de fouler la justice du pied, de détourner les deniers publics, de vivre à la sueur du front des autres. Tout ce qui compte, c’est de s’inscrire comme un mouton dans le courant du parti berger.  

L’important décalage entre les attentes du peuple et les possibilités actuelles du gouvernement constitue une problématique sociale sérieuse et on risque d’assister assez rapidement à des désillusions spectaculairement douloureuses. Rien n’a véritablement changé. Nous sommes passés d’un mode arrogant à un mode de consentement vicieux et trompeur. Les pratiques politiques les plus abjectes sont plus que jamais enracinées au cœur du système. Les yakaaristes se sont enveloppés dans ce qu’il y a de plus ignoble. Le mensonge demeure le lieu commun dans toutes les entreprises de gouvernance. La transhumance est la chose la plus transparente. Le gré à gré prend du service. Les magouilles s’intensifient. Le PDS se plaint et oublie majestueusement le peuple. Moustapha Niasse néglige les paysans qui, disait-il, étaient affamés. La société dite civile hiberne dans un silence coupable. Idrissa Seck s’occupe de son futur passé. Ousmane Tanor Dieng surveille ses arrières. Amath Dansokho déguste son heure de gloire. Aliou Sow virevolte. Pape Diop gigote. Abou Latif Coulibaly en a marre de y en a marre. Macky Sall maquille son frère d’or noir. Et pendant ce temps… 

PENDANT CE TEMPS LE PEUPLE TRINQUE. La classe politique de notre pays n’est mue par autre chose sinon que de parvenir. L’idéal n’est pour elle qu’un leurre et l’idéologie, un faire-valoir. Le titre et l’argent, c’est tout ce qui intéresse nos hommes politiques. Les larmes de Moustapha Niasse qui a tout eu ou presque en politique, le combat de Moustapha Cissé Lô pour le poste de Président de l’assemblée Nationale, les cuisines internes du PDS qui ont causé sa perte, les violences parfois meurtrières dans les renouvellements des instances de syndicats ou de partis politiques, le spectaculaire revirement de Latif Coulibaly et les scissions au sein des mouvements citoyens sont autant d’exemples qui étayent nos propos. Au lieu de s’installer donc dans leur fauteuil pour gouverner les institutions, nos dirigeants s’asseyent sur les institutions pour surveiller leur siège. 

Toute analyse, même superficielle de notre société, arriverait à une conclusion analogue. On ne parvient vraiment dans la société sénégalaise que quand on occupe, par quelque moyen que ce soit, ce que communément nous appelons « poste de responsabilité ». C’est là seulement que commence notre existence sociale. On se croit alors non seulement plus valeureux que nos compatriotes mais aussi et surtout, investi d’une puissance divine, d’une mission sacrée. On va même jusqu’à considérer que notre maman est plus probe que toutes les autres mères sénégalaises. Cette supposée réussite ne représentant en effet que la récolte des graines que notre mère aurait semées dans le jardin paternel : « Ligéyou ndèye, agnoup dom ». Ledit poste de responsabilité, au lieu donc d’être un moyen de servir le peuple, devient dans l’ordre de cette croyance, un moyen de se servir du peuple. 

LA VERSION FINALE DU PROGRAME PRESIDENTIEL publiée sur makymetre.com nous interpelle à ce titre. Incohérent et irréaliste, il ne témoigne de rien si ce n’est que les yakaaristes prennent leur désir pour la réalité. Dans tous les sens du terme, le fameux yoonu yokutté tient en trois : abuser, détourner la vérité, tromper. Comment ne pas succomber à l’espoir qu’il existerait une manière rapide d’éliminer l’emprise de la pauvreté dans laquelle nous menons notre existence ? Mais le remède que prétend porter ledit espoir pourrait aggraver le mal que l’on veut combattre. En vérité il n’y a que deux types de politiciens au Sénégal : ceux qui utilisent l’argent pour avoir la masse, et ceux qui utilisent la masse pour avoir l’argent. Qui donc ose parler de rupture ? 

Pierre Hamet BA

01er Février 2013

 

 

 

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Tais-toi quand tu parles !

« Pour être téméraire, il ne suffit pas d’être volontaire,

il faut encore être innocent jusqu’à l’ignorance. »

George Sand – 1853.

« Pour être téméraire, il ne suffit pas d’être volontaire,

il faut encore être innocent jusqu’à l’ignorance. »  George Sand – 1853.

Ce jour-là, il était drapé d’un boubou blanc, « copati » en couronne, on aurait dit un ombrageux chef africain au sommet de sa gloire. Sa connaissance de la géopolitique africaine est, pour le moment, rudimentaire. Pris à l’hameçon français, « l’intouchable » amalgame terrorisme, islamisme, extrémisme, sécurité et droits de l’homme pour justifier l’enrôlement de notre armée au Mali. Conseillers, ministres, députés et proches collaborateurs qui auraient pu lui apporter la bonne formule se sont fourvoyés. 

Mais à quoi lui servent donc les dinosaures socialistes et cette cohorte de conseillers, experts en tout, qu’on croyait disposer d’une assez bonne connaissance de la géopolitique sous-régionale ? Manifestement à pas grand-chose. Sinon comment expliquer que « l’intouchable » ait pu parler de tout sauf de l’essentiel ? La lutte contre le terrorisme qu’il croit servir en envoyant nos Diambars au Mali n’est qu’un leurre destiné à faciliter la réalisation de projets politiques de ses maîtres blancs. Son but est de légitimer le nouvel impérialisme. Que prétendaient faire les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France en bombardant l’Afghanistan et l’Irak ; la Chine en déployant des troupes au Xinjiang ; la Russie en rasant Grozny ; Israël en commettant des crimes de guerre ? Ils prétendaient tous lutter contre le terrorisme. Et nous ne connaissons que trop bien ce qu’il en a été des richesses de ces territoires envahis.

On nous tue, mais on ne nous déshonore pas. A ce titre, vous n’avez pas le droit de faire de nos Diambars des chiens de garde. Prenez donc votre courage à deux mains et rendez-vous bien compte que la guerre au Mali n’est à l’évidence qu’un prétexte pour justifier les exactions de puissances expansionnistes contre les populations Touareg qui menacent de faire sécession. Pour peu que vous fassiez tomber vos lunettes, vous verriez au loin qu’il s’agit là, d’une nouvelle tarte à la crème pour des Etats en panne économique. C’est moins le terrorisme que la haute portée géostratégique du territoire des Touaregs qui motive les colons des temps modernes. Vous le savez, ce territoire s’étendant du nord du Mali au massif de l’Aïr au Niger qu’occuperait un Etat Touareg est le lieu de projets euro-américains extrêmement stratégiques parmi lesquels l’ouverture d’une base américaine de lancement de drones pour renforcer celles qui existent déjà à Djibouti, en Ouganda et en Éthiopie aux côtés des flottes aériennes de surveillance basées en Mauritanie, au Burkina Faso et au Sud Soudan ; la réalisation du projet d’installation de panneaux solaires géants appelé DESERTEC d’un budget de 400 milliards d’euros qui doit fournir de l’électricité bon marché à l’Europe ; l’investissement par AREVA d’environ 1,5 milliards d’euros en vue de racler la deuxième plus grande mine d’uranium du monde récemment découverte à Imouraren etc.

Voilà qui met en exergue la face cachée de la guerre dans laquelle l’intouchable enrôle brutalement nos Diambars sans se soucier de l’opinion du peuple. Bien sûr le maître s’engage, les élèves lui emboîtent le pas. Mais cette guerre n’a rien d’un secours porté à la souveraineté du Mali. Elle est foncièrement motivée par un souci économique. Car, même si au Mali les Touareg revendiquent une région très pauvre et sans grande utilité économique ; au Niger par contre, se trouve au cœur de l’Aïr, à Arlit, la mine d’uranium souterraine la plus vaste du monde. 3.000 tonnes de minerai y sont produites chaque année et la capacité sera doublée en 2014. Gober alors que la France, premier exportateur d’énergie nucléaire au monde sans avoir d’uranium sur son sol, mène une croisade contre le terrorisme au Mali, relève de la pure naïveté.

Bien entendu nous sommes d’accord avec Yves Le Drian, ministre français de la Défense quand il soutient dans Libération que « la sécurité de l’Europe est en jeu au Mali […] ». Mais en vérité la sécurité européenne est en jeu, pas parce que des criminels coupent des mains et des pieds, détruisent des mausolées, fouettent des nègres qui ne sont « pas assez entrés dans l’histoire » (Sarkozy), mais parce que toute la géopolitique Sahélo-Saharienne est en reconfiguration. La France et ses chiens de garde vont alors en guerre comme si Berlin avait été un décret divin. Or, il convient de se rendre compte que le peuple Touareg, au Mali comme au Niger, repose sur le même socle culturel ; partage la même histoire, la même cosmogonie, le même imaginaire, les mêmes héros ; dispose d’une organisation politique ; parle la même langue, bref… tout ensemble caractéristique d’une Nation. Mais il ne dispose pas de sa destinée sur un territoire qu’il occupe de tout temps. C’est bien de cela qu’il s’agit : d’une question géostratégique qui pose avec une certaine acuité la problématique de l’intangibilité des frontières africaines et de la pertinence de la souveraineté que la première conférence des États indépendants d’Afrique noire s’est bornée à ériger comme principe inaliénable d’une morale internationale africaine.

Il ne suffit donc pas d’être innocent jusqu’à l’ignorance pour faire du terrorisme et de la rébellion Touareg quelque chose comme mouton et bouton ; il faut surtout être téméraire et volontariste. Envoyer nos Diambars au nom d’une « juste » guerre qui n’a de juste que les intérêts inavoués des grandes puissances économiques est indéfendable. Il vaut mieux alors se taire et continuer à faire comme si.

Pierre Hamet BA

24 Janvier 2013

Cameraman recording interview at media press conference. Live streaming concept.